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IRIS VAN HARPEN : Sculpting the senses – l’Expo mode à Paris à ne pas manquer !

À peine franchie l’entrée du Musée des Arts Décoratifs, on devine qu’il ne s’agira pas d’une simple exposition de mode. Le silence est dense, presque sacré. À travers une lumière diffuse, les silhouettes suspendues d’Iris van Herpen apparaissent comme des créatures surgies d’un rêve, mi-humaines, mi-organiques. “Sculpting the Senses” est plus qu’une rétrospective. C’est une plongée dans un univers où le vêtement n’habille plus, il transforme.

Depuis plus de dix ans, Van Herpen compose un langage propre, au croisement de la science, de l’art et de la technologie. Ici, ses robes ne se contentent pas d’être belles : elles questionnent. Que devient le corps dans un monde en mutation constante ? Comment redessiner l’humain quand l’intelligence artificielle, les biotechnologies ou les forces naturelles façonnent de nouvelles frontières du réel ? Ces interrogations sont le fil rouge de cette exposition hypnotique.

Divisée en neuf chapitres thématiques, la scénographie imaginée par le Studio Nathalie Crinière accompagne le visiteur dans une exploration sensorielle rare. Des créations emblématiques comme Magnetic Motion ou Voltage cohabitent avec des œuvres d’art contemporain (Philip Beesley, Damien Jalet…), des fossiles marins ou encore des sculptures biomorphiques, abolissant la frontière entre la mode et l’installation muséale. Le tout baigne dans une bande-son vibrante signée Salvador Breed, qui amplifie cette sensation d’apesanteur.

On y voit des robes faites de feuilles imprimées en 3D, de vagues cristallines, de filaments évoquant les réseaux neuronaux ou mycéliens. On y sent la fascination de la créatrice pour le vivant, mais aussi son intuition aiguë des devenirs possibles du corps. Iris van Herpen n’imagine pas des vêtements pour demain. Elle imagine des métamorphoses, où la matière épouse la pensée, où la science devient poésie.

Ce qui frappe, c’est la cohérence extrême de son œuvre. Chaque robe est un manifeste. Aucun ornement gratuit, aucune provocation inutile. Van Herpen compose des volumes comme d’autres écrivent des poèmes, avec une précision millimétrée et une sensibilité vertigineuse. Le résultat est souvent émouvant, parfois déroutant, mais toujours profondément humain.

L’exposition, à voir jusqu’au 28 avril 2024, s’inscrit dans un moment où la mode cherche désespérément du sens. Dans ce vacarme visuel généralisé, l’univers d’Iris van Herpen apparaît comme un souffle. Une respiration lente et précieuse, qui nous rappelle que la beauté peut être conscience, que le vêtement peut devenir un médium pour penser et sentir autrement.

Iris van Herpen – Sculpting the Senses
Musée des Arts Décoratifs, Paris
Jusqu’au 28 avril 2024
madparis.fr